Présentation au lecteur
Beaucoup veulent ouyr et ne savent entendre.
François de Foix
La sagesse est aussi rare au Tibet qu’à Paris – disait Louis Cattiaux. Elle peut fleurir partout cependant, sans que nul ne s’en doute. Un homme semblable, mais pas pareil, à tant d’autres vivant dans la grande ville, a écrit ces pages qu’il appartient au lecteur de juger. Elles ne sont pas pour tous, bien qu’elles soient destinées à circuler parmi les hommes d’aujourd’hui qui, par négligence de la révélation ancienne, se sont laissé couler en ignorance profonde.
Ceux pour qui ce livre a été écrit le sauront bien en le lisant car il leur est donné, comme le dit l’auteur, de croire l’incroyable. Ceux-là sauront le lire et l’entendre, ceux-là appartiennent à la même famille spirituelle. Avant de quitter ce monde, le 16 juillet 1953, l’auteur le leur a laissé comme un signe de ralliement et une raison d’espérer; il l’a dédicacé plus spécialement aux peuples noirs, encore divisés et comme dans l’enfance, mais appelés à devenir puissants dans le monde par le jeu d’une Providence insouciante des intentions et des travaux des hommes.
Le Message Retrouvé est d’un abord difficile. Il contient, au dire de l’auteur, « une initiation et une mystique étroitement unies et présentées sous une forme concentrée qui exige plus que la lecture ordinaire, les mots étant dépassés par la révélation et l’ouvrage se présentant comme de l’air liquide qui a acquis d’autres propriétés extraordinaires, mais invisibles au premier examen… »
Les versets sont disposés sur deux colonnes, car il y a deux hommes en nous, l’homme charnel et l’homme spirituel, l’homme extérieur et l’homme intérieur, comme il y a aussi les ténèbres et la lumière, la justice et l’amour, le pur et l’impur; toutes choses sont disposées deux à deux. Chacun des versets comporte plusieurs sens en profondeur, la colonne de gauche donnant généralement les sens terrestres: moral, philosophique et ascétique; la colonne de droite donnant les sens célestes: cosmogonique, mystique et initiatique. Parfois ces versets sont complétés par un troisième placé au milieu de la page, accordant les deux autres dans le sens alchimique qui unit le ciel et la terre, touchant au mystère de Dieu, de la création et de l’homme; ce sens le plus profond, il n’appartient qu’à Dieu de le découvrir à l’homme pieux. On remarquera aussi que chacun des 40 livres porte un double titre, par exemple, pour le livre 1, à gauche: vérité nue, à droite: la pousse verte. Les quarante titres sur les colonnes de gauche sont des anagrammes les uns des autres. Il est bien rare de pouvoir faire quarante anagrammes au moyen de neuf lettres toujours les mêmes. Le lecteur entendu s’apercevra qu’il n’y a pas un mot de ce livre qui n’ait été mis sans intention.
Le Message Retrouvé ne nous parle que d’une seule chose, en termes toujours différents, aussi la multitude des versets n’est-elle pas une dispersion. Les ignorants à la recherche d’une nouvelle révélation venant ajouter ou retrancher quelque chose à l’ancienne seront déçus. On ne trouvera ici qu’un témoignage en faveur de l’ancienne qui nous parle de la chute de l’homme dans ce monde bas, des conséquences physiques et morales de cette chute, et du moyen de sa régénération corporelle et spirituelle, par la voie mystérieuse qui mène à la résurrection.
Peut-être scandaliserons-nous plus d’un lecteur en affirmant ici que l’Esprit d’Élie, toujours vivant, se manifeste d’âge en âge: que ceux-là s’abstiennent, car c’est ici le rocher de scandale. Bienheureux cependant, celui qui saura, dans les pages qui vont suivre, dégager cet esprit de sa rude écorce, en reconnaître l’authenticité et s’en nourrir pour une vie éternelle.
La dédicace générale du Message Retrouvé nous apprend qu’il est destiné « à la gloire de Dieu et pour le service des hommes qui liront avec les yeux de l’esprit et du cœur les signes inscrits dans la chair du monde ». Les yeux de la raison charnelle ou de l’intellect ne nous enseigneront, en effet, rien, là où le langage s’adresse aux yeux de l’esprit et du cœur. Les premiers ne nous livrent que l’écorce ou l’apparence changeante du monde; les seconds nous guident vers l’Essence et la Substance, son support indestructible, et nous font reconnaître la lumière interne que Dieu alluma au commencement dans la nature et dans notre cœur.
Il s’agit donc d’un ouvrage de méditation qui demande à être lu, relu, et étudié dans la simplicité de l’esprit et la pureté du cœur. N’est-ce pas la multiplicité et l’agitation de l’esprit qui nous privent de la possession du Royaume des Cieux, et l’impureté de nos cœurs qui nous éloigne de la vision de Dieu?
Le témoignage des Écritures nous apprend que la connaissance de la lumière divine doit procéder, non de l’extérieur, mais du dedans; réveillée et excitée par son origine libre, cette lumière enfouie germe alors, et, devenant la « juste mesure » et la source de nos jugements, elle « paraît ensuite au-dehors et resplendit pleinement dans l’union ».
Un sourd jugera de la musique d’après la relation qu’on pourra lui en faire, parce qu’il manque de la jouissance de l’organe qui lui permette de l’expérimenter par lui-même. Il en est de même pour les autres sens. La lumière luit dans les ténèbres, mais si l’homme est privé de l’usage de l’organe propre à appréhender cette lumière intérieure, celle-ci est pour lui ténèbres tant qu’il n’aura pas recouvré le regard de l’esprit et du cœur.
Si vous avez la foi et la patience – écrivait l’auteur au sujet du Message Retrouvé – il s’éclairera de lui-même un peu à la fois, et tout ce qui vous semble obscur vous paraîtra alors évident.
C’est ainsi que nous proposons au lecteur de se faire personnellement une opinion sur l’œuvre proposée et de juger par lui-même si elle est identique ou non à l’enseignement traditionnel.